Crocus sativus : un peu de botanique

Le safran est une épice issue du Crocus sativus linnaeus, une plante herbacée à bulbe qui appartient à l’ordre des Liliacées au même titre que les jacinthes, les narcisses, l’oignon et l’ail. De la famille des Iridacées, le crocus appartient à la sous-famille des Crocoïdes. Plante vivace à végétation inversée, Crocus sativus connait une période de dormance pendant l’été (de juin à mi-août), période pendant laquelle elle perd ses feuilles. Elle sort de son repos végétatif fin août, fleurit à l’automne et développe son feuillage de la floraison à la fin du printemps. Crocus sativus est un triploïde stérile, qui ne produit pas de graines viables. Cette plante est donc dépendante de l’homme qui assure sa reproduction par division du bulbe.

Selon des recherches botaniques récentes, Crocus sativus serait originaire de Crète, et non d’Asie centrale, comme on le croyait autrefois. Ce serait le résultat d’une sélection intensive de Crocus cartwrightianus, un crocus à floraison automnale originaire de l’est de la Méditerranée, sélectionné par des producteurs qui désiraient obtenir de plus longs stigmates.

Toutefois, il se pourrait que le Crocus thomasii et que le Crocus pallasii soient également des ancêtres potentiels. Ce qui paraît certain, en revanche, c’est que les bulbes actuels seraient les descendants d’un seul et unique bulbe ou corme (cormus).

La relation phylogénétique entre Crocus sativus (un triploïde stérile) et Crocus cartwrightianus (diploïde) est évidente. Il n’est cependant pas formellement établi si d’autres espèces ont participé à d’anciennes hybridations qui ont abouti au Crocus sativus. L’analyse de l’ADN nucléaire de Crocus sativus confirme que Crocus cartwrightianus est l’ancêtre le plus vraisemblable du safran. D’autres espèces apparentées, notamment Crocus thomasii et Crocus pallasii, sont cependant aussi des ancêtres potentiels. Le safran a un pollen stérile, mais s’il est pollinisé par Crocus cartwrightianus ou Crocus thomasii, il produira des graines. (1)

Qualifié d’ « or rouge » en raison de la couleur de ses stigmates, le safran est la seule épice issue d’une fleur. Réputée pour être une des épices les plus chères au monde – en raison de l’énorme travail et attention qu’il réclame, le safran est produit à partir des fleurs d’un bulbe d’automne de la famille des iridacées, le Crocus sativus linnaeus.

Croquis du Crocus sativus, réalisé à partir l'illustration botanique du Kohler's Medicinal Plants (1887)

Croquis du Crocus sativus, réalisé à partir de l’illustration botanique du Kohler’s Medicinal Plants (1887)

Les cormes de Crocus sativus

De la famille des iridacées, c’est une plante bulbeuse acaule à caïeux. Les bulbes ou cormus sont solides, arrondis sur le dessus et aplatis en dessous. Le corme est recouvert de plusieurs tuniques minces, scarieuses, fibreuses et nervées. Toutes les tuniques composant l’enveloppe constituent ce que l’on appelle la robe du safran. Les cormes ne vivent qu’une saison. Son feuillage est composé de feuilles d’un vert mat ou brillant. Chaque corme produit six à sept feuilles au limbe étroit et linéaire, divisé supérieurement par une ligne argentée et se terminant en pointe. Leur longueur peut atteindre entre 20 et 65 centimètres. Ces feuilles apparaissent d’octobre jusqu’au début du mois de mai. Ensuite, elles jaunissent et se dessèchent.

Les cormes du Crocus sativus sont de petits globules bruns d’environ 4,5 centimètres de diamètre enveloppés dans une natte dense de fibres parallèles. Les cormes, qui ne survivent qu’une saison, doivent être divisés manuellement et cassés, puis replantés. Ils fourniront ainsi jusqu’à dix caïeux, qui produiront de nouvelles plantes (caïeu : bourgeon secondaire, petit bulbe ou corme se formant à la périphérie du bulbe ou du corme principal chez certaines plantes à bulbe). (2)

Les fleurs de Crocus sativus

Sa fleur hermaphrodite est solitaire ou fasciculée d’une longueur de 2 à 5 cm. Elle est formée de 6 tépales ovales (tépales : pièce de l’enveloppe florale lorsqu’elle est simple, c’est-à-dire lorsqu’on ne peut pas distinguer des pétales et des sépales) : 3 pétales et 3 sépales, de couleur rose à violet soutenu ou blanc avec des veines plus sombres. Elle est enveloppée d’une spathe à 1 ou 2 valves, doté d’un calice à tube très long. (1)

L’androcée est composé de trois étamines jaunes libres chargées de pollen stérile. Le pistil est filiforme se divisant en trois stigmates rouge vif, dentelés, plissés et dilatés au sommet. La longueur du pistil varie de 3 à 5 centimètres. Ce pistil est relié à la plante par un style allongé, droit et filiforme de couleur blanche. Le fruit est en capsule à 3 loges. Les graines sont nombreuses à strophioles. Seule la partie rouge intense des stigmates est utilisé pour produire un safran de qualité. Les parties plus claire, à la base du pistil, non pas la même valeur gustative et ne doivent pas être utilisées. Le respect de cette contrainte, est d’ailleurs l’un des principaux critères de qualité du safran. (2)

Ce sont plus de 150 composés aromatiques et volatils qui ont été identifiés dans le safran. Mais trois composés principaux le caractérise : 1°) La picrocrocine. C’est elle qui donne le gout, la saveur amère du safran. 2°) La crocine : soluble dans l’eau, c’est elle qui donne la couleur jaune d’or typique des plats au Safran. 3°) La Safranal. C’est principalement cette huile volatile qui est à l’origine de l’arôme du safran.

Après une période de repos en été, appelée estivation, cinq à onze fines feuilles vertes verticales, pouvant atteindre jusqu’à quarante centimètres de long, émergent du sol. En automne, des bourgeons pourpres apparaissent. C’est seulement en octobre, après que la plupart des autres plantes à fleurs ont relâché leurs graines, que Crocus sativus développe ses fleurs colorées, allant d’un léger lilas pastel à un mauve plus foncé et strié. Durant la floraison, le safran mesure un peu moins de trente centimètres de haut. Dans chaque fleur, on trouve un style présentant trois fourches, chacune se terminant par un stigmate cramoisi de vingt-cinq à trente millimètres de long. (1)

Une confusion possible avec le colchique

Dans nos contrées, la fleur du Crocus sativus ressemble beaucoup à une plante non apparentée, le colchique d’automne (Colchicum autumnale). Celui-ci, également violet, est une plante toxique qui contient un poison dangereux, la colchicine, antimitotique utilisé dans le traitement de la goutte. Il est pourtant facile de les différencier : le colchique possède 6 étamines contre seulement 3 pour le crocus.

Le colchicum autumnale à ne pas confondre avec le safran (crocus sativus)

Le Colchique d’automne, une plante toxique que l’on peut confondre avec le Crocus sativus. © Luc Viatour | www.Lucnix.be


Notes :

Crédit Photos :

  • Le colchique d’automne (Colchicum autumnale), By Luc Viatour (Own work), via Wikimedia Commons.

LE SAFRAN DU PÉRIGORD

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