Dans un souci d’unifier la nation, le gouvernement révolutionnaire supprime les anciennes provinces gouvernées par des régimes différents et procède à un découpage en départements, tous soumis aux mêmes règles administratives. Cette réorganisation du Périgord autour de Périgueux, sa capitale historique, ne fait que confirmer une unité qui existait depuis le temps de la confédération gauloise. Le cadre naturel de l’ancienne province contribue à maintenir, pratiquement en l’état, la fixité de ses limites. Finalement, seul le nom est nouveau : département de la Dordogne.
En 1317, le Pape Jean XXII divise le comté du Périgord en deux diocèses, Sarlat et Périgueux, après quoi des seigneuries et des baronnies semi-indépendantes se créent à partir de là, autour de Mareuil, Ribérac, Hautefort, Grignols, Bourdeilles et Bergerac. D’étape en étape, le Périgord se morcelle et le désordre le plus complet finit par régner sur ses divisions qui se chevauchent les unes les autres. C’est la réforme administrative de la Constituante qui redonne vie au Périgord.
Suite à la proposition des huit députés périgourdins siégeant à la Constituante en date du 26 janvier 1790, le département « de Périgueux » ou « du Périgord » voit le jour, lors de la réorganisation administrative de la France, à laquelle participait le Périgourdin Pierre de Belleyme, ingénieur géographe du roi Louis XV, à qui l’on doit la fameuse Carte de Guyenne. Un mois plus tard, le 26 février 1790, le nom de Dordogne est retenu par décret, après l’adoption définitive de la liste des 83 départements français, privilégiant ainsi les désignations géographiques, politiquement neutres. Mais leurs existences ne prirent effet que le 4 mars suivant. C’est donc cette date du 4 mars 1790 que l’histoire retiendra comme date de création du département de la Dordogne.
Le découpage des départements en arrondissements, cantons et communes fut instauré le 17 février 1800 permettant la création des préfectures et sous préfectures, les conseils généraux ainsi que la fonction de préfet. Ce nouveau découpage permet une meilleure organisation du territoire. De plus, les limites de chaque territoire ont été fixées de telles façons que leur chef-lieu puisse être atteint en une seule journée de cheval.Le département de la Dordogne fut formé de la presque totalité des communautés paroissiales de l’ancienne province du Périgord (786 048 hectares) et d’une partie de l’Agenais (99 250 hectares), pays appartenant tous les deux à l’ancienne Guyenne, ainsi que d’une portion du Limousin (25 858 hectares) et de l’Angoumois (30 250 hectares).
À la suite de la Constitution civile du clergé, les diocèses prennent le nom de département. Les 696 communautés paroissiales retenues en 1790 devinrent 628 communes en l’an II. Puis le jeu des regroupements et des créations de communes aboutit finalement au nombre actuel de 520.
En septembre 1791, Périgueux est désigné comme chef-lieu du département.
En 1793, les communes de Boisseuilh, Coubjours, Génis, Payzac, Saint-Cyr-les-Champagnes, Saint-Mesmin, Salagnac, Savignac, Saint-Trié et Teillots sont détachées, par décret, du département de la Corrèze pour être réunies à la Dordogne. En 1794, la commune de Cavarc est cédée au Lot-et-Garonne. Le 6 Nivôse An III, la commune de Parcoul est détachée de la Charente-Inférieure et réunie à la Dordogne. Le 14 juillet 1819, la commune de Bonrepos est détachée du département et fusionne avec Souillac dans le Lot. Il aura donc fallu attendre vingt-neuf ans pour que le département de la Dordogne adopte son contour définitif.
Au final, la province du Périgord a su préserver son unité malgré les vicissitudes de l’histoire. En effet, « le cadre géographique du nouveau département ne différait guère de la province du Périgord, elle-même lointaine héritière de la tribu des Pétrocores. » (1) À ce propos, Camille Jullian, historien de la Gaule déclare : « À quelques communes près, les Petrocorii correspondent au département de la Dordogne. Le Périgord offre l’un des plus complets exemples de continuité qu’on puisse trouver dans la géographie historique des Gaules. »
Les divisions administratives en 1790
En 1790, la Dordogne fut divisée en 72 cantons. En 1800, la Constitution de l’An VIII ramena le nombre des cantons de 77 à 47. Au 1er janvier 2017, ce nombre est de 25
Le nombre des arrondissements à tout d’abord été fixé à neuf par la Constituante : Périgueux, Bergerac, Sarlat, Nontron, Excideuil, Montignac, Belvès, Ribérac et Montpon. La Constitution de l’An III (1795) les supprima et celle de l’An VIII (1800) en rétablit cinq. Ces cinq arrondissements correspondent en gros aux divers réseaux hydrographiques : Périgueux (Isle), Bergerac Dordogne entre Limeuil et Le Fleix), Sarlat (Vézère-Dordogne), Nontron (vallées de l’Angoumois) et Ribérac (Dronne). Ribérac fut finalement supprimé en 1926. En 1965, suite à la fusion des communes de Sarlat et de La Canéda, l’arrondissement de Sarlat devient l’arrondissement de Sarlat-la-Canéda.
Précisons enfin, qu’à l’origine, le rôle de chef-lieu devait être assuré par rotation entre Périgueux, Bergerac et Sarlat. Toutefois, dès septembre 1791, cette décision est définitivement reportée au seul profit de Périgueux.
Les divisions administratives en 1879
En se basant sur les statistiques du recensement de 1866, Jules Verne décrit ainsi les divisions administratives du département de la Dordogne dans sa « Géographie illustrée de la France et de ses colonies »(2) , éditions 1879 :
Le département de la Dordogne comprend cinq arrondissements qui se subdivisent ainsi :
- Arrondissement de Périgueux (9 cantons, 113 communes).
- Arrondissement de Bergerac (13 cantons, 172 communes).
- Arrondissement de Nontron (8 cantons, 80 communes).
- Arrondissement de Ribérac (7 cantons, 84 communes).
- Arrondissement de Sarlat (10 cantons, 133 communes).
Soit un total de 47 cantons et 582 communes.
Ce département forme la 4e subdivision de la 14e division militaire dont le siège est à Bordeaux.
Dans l’organisation religieuse, il forme le diocèse de Périgueux qui est suffragant à l’archevêché de Bordeaux ; le diocèse compte 64 cures, 429 succursales, 53 vicariats rétribués par l’État, un grand séminaire à Périgueux, deux petits séminaires à Bergerac et à Sarlat. Les protestants, assez nombreux dans ce département, possèdent 13 temples.
Dans l’organisation judiciaire, la Dordogne comprend 5 tribunaux de premières instances aux chefs-lieux d’arrondissement, et 3 tribunaux de commerce à Périgueux, à Bergerac et à Sarlat, qui ressortissent à la Cour impériale de Bordeaux.
L’instruction publique possède dans ce département un lycée et une école normale d’instituteurs à Périgueux, deux collèges communaux à Bergerac et à Sarlat, un cours normal d’instituteurs à Terrasson, et 615 écoles publiques et libres qui relèvent de l’Académie de Bordeaux. Près des trois cinquièmes des jeunes gens appelés à la conscription ne savent ni lire ni écrire.
Cette description par Jules Verne des divisions administratives datant de 1879 permet d’avoir une photographie assez précise du département 90 ans après sa création.
Les divisions administratives aujourd’hui
Depuis 1972, date à laquelle furent créées les 22 régions françaises, le département de la Dordogne est rattaché à l’Aquitaine. Et depuis le 1er janvier 2016, le département est rattaché à la Nouvelle-Aquitaine, une nouvelle région administrative française résultant de la fusion des anciennes régions Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes. — Pour en savoir plus, consultez la page consacrée aux Limites administratives du département de la Dordogne.
Pour information, Wikipedia publie une page consacrée aux différentes créations, modifications et fusions des communes du département à compter de la Révolution française jusqu’à nos jours. Consultez la Liste des anciennes communes de la Dordogne.
Notes et sources :
- (1) Bernard Lachaise (dir.) et al., Histoire du Périgord, Périgueux, éditions Fanlac, ISBN 2-86577-216-0.
- (2) L’intégralité de l’ouvrage « Géographie illustrée de la France et de ses colonies » est téléchargeable sur le site de la BNF à cette adresse : http://gallica.bnf.fr.
- La vie quotidienne en Périgord au temps de Jacquou le Croquant, Gérard Fayolle, Éditions Hachette Littératures, 2002.
Sources :
- Patrick Ranoux, préface de René Pijassou, Atlas de la Dordogne-Périgord, p. 15, Ouvrage publié à compte d’auteur, Speed impression, 1996, ISBN 978-2-9501-4761-5.
- Archives départementales de la Dordogne : Carte de Belleyme.
- Géographie illustrée de la France et de ses colonies par Jules Verne, Éditions J Hetzel Paris – 1879.
Iconographie :
- « Carte de France divisée suivant le plan proposé à l’Assemblée nationale par son comité de constitution le 29 septembre 1789 », par L. Hennequin, topographe du roi. Le tracé est réalisé sur une carte exécutée en 1780 par Robert de Hesseln. Cette image est dans le domaine public (copyright expiré). Source : Wikipedia.