Longtemps considérée comme une arnaque à touristes, la truffe d’été (Tuber aestivum) a ses fervents défenseurs. Toutefois, elle n’a jamais le parfum suave et pénétrant de la truffe noire d’hiver, alias truffe du Périgord (Tuber melanosporum). De plus, la truffe blanche d’été ne supporte pas la cuisson ; elle se consomme exclusivement crue et râpée. (1)
La truffe Tuber aestivum – dite truffe de la Saint-Jean ou truffe blanche d’été – se récolte d’avril-mai à la fin août, exceptionnellement fin septembre, en fonction des pluies de printemps (à noter toutefois qu’à partir du 15 août elles deviennent souvent véreuses). Les Italiens l’appellent la « truffe du soleil ». Pour rappel, la truffe noire se récolte en hiver, de décembre à mars.
Récoltées dans les mêmes truffières que la Melanosporum avec laquelle elle cohabite d’ailleurs très bien, Tuber aestivum est en train de devenir un produit très tendance. Pourtant, jadis, les paysans la réservaient aux cochons ! C’est lorsque le dressage des chiens a commencé, il y a une quarantaine d’années, que cette truffe a commencé à susciter quelques intérêts. Aujourd’hui encore, les Provençaux s’en servent pour le dressage des chiens. En fait, elle a longtemps été considérée comme une arnaque à touristes. On lui reproche d’être très peu gouteuse, avec un arôme léger qui disparaît à la cuisson. C’est vrai qu’elle n’a pas grand-chose à voir avec la truffe noire d’hiver dotée d’un parfum suave qui a fait sa renommée dans la haute gastronomie. Alors…
Pourquoi cet intérêt soudain pour la truffe d’été ?
Laissons la parole à quelques-uns de ses fervents défenseurs :
- Pour Pierre et Maryse Chaulet, passionnés de truffes depuis vingt-cinq ans et fervents défenseurs de la variété d’été, « elle a un tiers de parfum en moins que celle d’hiver, mais c’est un beau produit qui ne souffre pas la médiocrité. »
- Selon Bernard Rosa, vice-président de l’Association des trufficulteurs du Lot-et-Garonne, « elle est plus douce, moins forte. Elle est subtile et longue en bouche, par rapport à la truffe d’hiver, puissante en odeur et en goût ». (1)
- À propos de la truffe d’été comparé à la truffe noire du Périgord, Éric Mariottat, chef étoilé au guide Michelin, déclare : « L’erreur serait de les comparer, elles sont incomparables. La truffe fraîche se marie très bien avec le poisson ». (2)
Comment reconnaître la truffe blanche d’été ?
L’apparence extérieure de la Tuber aestivum est assez similaire à celle de la Melanosporum, souvent plus volumineuse et plus ferme, mais de densité plus légère. Elle peut atteindre la grosseur d’un poing. Globalement pourtant, ses caractéristiques sont plus proches de Tuber uncinatum (truffe de Bourgogne) dont elle est une proche parente.
Tubercule sphérique ou oblong de couleur brune, elle se reconnaît à sa forme irrégulière et à sa surface piquetée de verrues saillantes, prismatiques ou pyramidales. Sa chair est blanche à l’intérieur lorsqu’elle n’est pas mûre, puis jaunâtre, et elle devient enfin beige noisette à maturité, parcourue de veines blanches et très fines. C’est en raison de sa chair claire qu’on lui donne le nom de « truffe blanche ». C’est cette chair blanche truffe que les fraudeurs teintent parfois pour simuler la truffe noire.
Attention à ne pas la confondre avec la très rare et très recherchée truffe blanche d’Italie, ou truffe d’Alba (Tuber magnatum), qui est de couleur blanchâtre tant à l’extérieur qu’à l’intérieur.
Tuber aestivum doit être ramassée à maturité. Elle a alors un bel arôme de sous-bois qui a été ainsi décrit : « faible parfum de champignon et de maïs cuit, de terre chaude et humide ». Sa saveur – qui s’apparente à la noisette ou à la rave – est agréable. Elle est fragile et doit être consommée rapidement, uniquement crue, car ses arômes volatils ne supportent pas la cuisson. Sa durée de vie n’excède pas quatre à cinq jours. Pour les mêmes raisons, elle ne se congèle pas. En effet, même sortie du congélateur, la truffe noire a nettement plus de goût que la truffe d’été. (3)
Le prix de la truffe d’été
La truffe d’été a un atout, non négligeable : son prix. Elle s’achète entre 100 € le kilo en gros et 220 € au détail, soit quatre à cinq fois moins cher que sa cousine d’hiver.
Elle doit se vendre à son prix, à environ un cinquième de celui de la truffe d’hiver. Soit de 100 à 150 € maximum au kilo. Celle d’hiver monte parfois même jusqu’à 1 000 €. — Michel Queyroi, le président de l’Union régionale.
La truffe blanche d’été dans l’assiette
Certes il s’agit d’un produit différent de Tuber melanosporum, mais elle n’en demeure pas moins un produit intéressant. D’ailleurs des chefs la proposent désormais à leur carte et des efforts de diffusion et de commercialisation sont entrepris par des trufficulteurs ou des groupements de trufficulteurs.
Comme signalé précédemment, cette truffe est généralement consommée crue, en salade, sur des pâtes, mais également à l’apéritif, émincée sur des toasts ou petits canapés, ou bien coupée en lamelles dans une assiette plate arrosée d’huile d’olive et de fleur de sel. Elle est aussi délicieuse en omelette, œufs au plat ou brouillades, et dans toutes les sauces de poissons ou de viandes… Elle rehausse également les carpaccios de poissons frais et tartares de bœuf pour tous les repas frais et gourmands. Enfin, son parfum délicat se prête bien à la fabrication de beurre truffé pour l’apéritif ou de glace laissant apparaître un petit goût de noisette.
Polémique autour de la truffe d’été
Les trufficulteurs craignent une confusion et des fraudes entre la truffe d’été et la truffe noire du Périgord, plus gustative et beaucoup plus chère. À ce propos, voici ce qu’on pouvait lire dans l’édition du quotidien Sud-Ouest du 10 juillet 2013 :
En Périgord, en matière de truffes, il faut savoir de quoi on parle. Le sujet peut déclencher des guerres. Le développement récent de marchés aux truffes d’été à Sainte-Alvère (le lundi), à Sarlat (le samedi) et parfois à Sorges provoquent des réactions, parfois vives, de la part des producteurs de truffes noires du Périgord. Leur président, Jean-Pierre Audivert, a mis les choses au point : « Les produits sont différents, et il faut les identifier pour ne pas tromper le consommateur. Nous comprenons que les maires veulent faire des animations l’été, mais il ne faut pas faire n’importe quoi. ». — Michel Queyroi, le président de l’Union régionale.
Notes :
- (1) La guerre des truffe, Journal Sud-Ouest du 10 juillet 2013.
- (2) La truffe fraîche d’été fait son marché, Journal La Dépêche, 16 juillet 2013.
- (3) Dossier Sylviculture Truffière, Forêt de France, n° 518, novembre 2008.
Crédit Photos :
- Truffe blanche d’été immature, By dailylifeofmojo (Own work), via Wikimedia Commons.
- Truffe blanche d’été ou truffe de la Saint-Jean, By Rippitippi (Own work), via Wikimedia Commons.