Le cavage : cochon ou chien truffiers ?

La récolte s’opère soit avec le porc dans les régions de Salignac, Nadaillac et Sorges, soit avec le chien à Domme surtout. (…) Signalons que la truie trouve la truffe par son odorat, mais aussi en tâtant le sol avec son groin ; que le chien la découvre seulement à l’odeur ; que les tournées de truffières avec le chien sont plus faciles, plus rapides, qu’avec la truie et qu’un chien bien dressé découvre toutes les truffes de qualité ; qu’avec le chien, au pied léger, il n’y a pas de truffière inaccessible quels que soient le relief et la végétation. (1)

Le cavage avec un cochon

C’est la méthode traditionnelle de cavage, longtemps utilisée par les trufficulteurs, mais elle est de moins en moins pratiquée, le chien ayant détrôné le porc ! Pourtant, contrairement au chien, celui-ci n’a pas besoin de dressage particulier pour trouver la truffe qu’il sent de fort loin et qu’il localise avec la précision d’un radar. En effet, caver pour se nourrir est une activité naturelle chez cet animal et, de plus, il raffole des truffes. Son parfum musqué serait assez proches de ceux émis par les organes sexuels d’une femelle en chaleur. Et c’est d’ailleurs là que réside tout le problème. Dans son cas, le dressage ne consiste pas à lui apprendre à trouver la truffe… mais plutôt à l’empêcher de la manger !

Un cochon bien dressé et bien entraîné se détourne aussitôt que la truffe est visible pour recevoir sa récompense. Mais, s’il est insuffisamment dressé, le caveur est souvent obligé de lui taper sur le groin avec une trique. Sinon, d’un coup de dent, la truffe est engloutie. Il faut être extrêmement vigilant et rapide ! En effet, dès qu’il sent une truffe, il enfonce son groin précisément sous le tubercule, puis, d’un mouvement sec, il le dégage prestement dans l’espoir de le dévorer. C’est à ce moment précis que le caveur intervient pour récupérer la précieuse trouvaille.

Pour motiver l’animal, on lui offre une compensation : quelques glands, un morceau de pain, un peu d’orge, du maïs, des fèves, des châtaignes ou des pommes de terre. Le plus souvent, ce sera du maïs. Elle en consomme 2 à 3 kilos dans la journée. Sans cette gratification, le porc renoncerait vite à poursuivre ses recherches, car il est d’une gourmandise insatiable ; c’est là son principal défaut !

À signaler également que, pour l’habituer à caver, il faut lui sacrifier deux ou trois truffes… Ensuite, il faut entretenir régulièrement ce goût naturel en lui donnant des morceaux de bonnes truffes. Un porc habitué à ne consommer que des truffes de mauvaise qualité (en voie de putréfaction) ou des variétés sans grand intérêt (T. Rufus ou T. Moschatum) pourrait ignorer la présence des bonnes. (2)

C’est (…) en Italie que le dressage du porc [pour la recherche de la truffe] a dû prendre naissance au moyen-âge ou vers le commencement de la renaissance. Au XVe siècle, l’auteur d’un livre de Honesta Voluptate dit que rien n’égale l’instinct des truies de Nursa ou Norcia pour découvrir les truffes cachées sous la terre. Peu de temps après, la même pratique devait exister en France, car un auteur obscur, Sipontinus, cité en 1550 par le médecin Bruyerin Champier, parlant des sangliers et des porcs comme cherchant naturellement des truffes, ajoute que les paysans dressent à cette chasse des porcs domestiques dont ils lient la gueule avec une courroie pour mettre un obstacle à leur gourmandise. Pas n’est besoin aujourd’hui d’une telle précaution ; un peu d’attention suffit au truffier pour empêcher l’animal de s’approprier le fruit de sa chasse ; quelques glands, un morceau de pain, un peu d’orge ou de maïs, récompensent le porc de sa trouvaille, et dom pourceau est si bien habitué à ce troc que le plus souvent, parvenu à l’objet de sa recherche, il s’arrête de lui-même, lève la tête, regarde son maître d’un air significatif qui veut dire : «  J’ai droit au salaire, » et consomme incontinent la maigre pitance qu’on lui jette à la place du tubercule odorant. — La truffe et les truffières artificielles, J.-E. Planchon. (3)

Le dressage d’un porc commence vers l’âge de 4 à 5 mois, il n’a toutes ses qualités qu’à l’âge de 3 à 4 ans, et il peut vivre jusqu’à 20-25 ans (toutefois, sa taille croissante devient un sérieux handicap pour les déplacements). L’animal s’apprivoise plutôt facilement, et il est rusé et vif. De plus, il est affectueux. Très jeune, on l’habitue à rechercher de véritables truffes qu’on l’autorise à croquer lorsqu’il les a découvertes. La substitution d’une récompense doit se faire progressivement, car contrairement au chien, le cochon recherche la truffe pour la manger et non pour faire plaisir à son maître. On l’enferme également dans une étable, pour l’empêcher de labourer la terre à sa guise. C’est ainsi que chaque sortie – à prévoir régulièrement – sera pour lui autant d’occasion de retourner le sol, une activité innée et irrépressible chez cet animal.

La truie est exercée dès l’âge de quatre à cinq mois et reste en service de vingt à vingt-cinq ans. Son choix n’est pas laissé au hasard. Le plus souvent, elle succède à sa mère près de qui elle s’est entraînée. Les marchands de porcs, qui reviennent des causses du Lot vers le Sarladais avec un troupeau, marquent les sujets qui fourragent sur les talus et s’inquiètent des truffes ; ils leur font subir un dressage d’un mois et en tirent un bénéficie accru. Les caveurs, qui tentent à la foire de se munir d’une nouvelle truie, se tiennent immobiles et marchandent les porques qui s’arrêtent devant eux et reniflent leurs souliers sous lesquels ils écrasent une truffe.Croquants du Périgord, Georges Rocal. (4)

recolte des truffes en perigord avec un cochon truffier

Le choix des porcs sélectionnés pour le cavage ne repose pas exclusivement sur des aptitudes héréditaires. On préférera souvent une femelle à l’odorat plus subtil que celui du mâle et d’humeur plus douce et moins capricieuse. Cette petite truie est choisie dès l’âge de quelques semaines, d’après l’intérêt qu’elle porte à la truffe qu’on lui présente, d’après son aptitude à la marche, d’après sa vivacité, ainsi que d’autres critères plus subjectifs…

Comme si sa gloire posthume ne lui suffisait pas, comme si le don de sa chair savoureuse ne lui assurait pas la reconnaissance de l’humanité tout entière, le cochon sait encore de son vivant participer à nos joies les plus rares. Cette bonne bête — la plus utile conquête de l’homme — et qui partage la plupart de ses passions, manifeste pour la truffe un goût irrésistible et sûr. Alors que vous pourriez tourner toute votre vie autour d’un chêne truffîer sans deviner où se cache le diamant noir de la gourmandise, le cochon hume le parfum de la truffe avec une délicatesse d’odorat aussi rare et aussi parfaite que le sens de la direction chez le pigeon voyageur : et n’écoutant que son courage, an risque d’endommager son organe olfactif, il plonge délibérément son groin frémissant dans la terre féconde. Mais avant même qu’il ait mis au jour la truffe savoureuse, un coup de bâton bien asséné lui dérobe le fruit de ses peines. Une poignée de glands suffit à le consoler. Et la brave bête, soumise à ce perpétuel supplice de Tantale, n’en continue pas moins ses recherches avec une inlassable ardeur. Peut-on imaginer un plus beau symbole de l’esprit de sacrifice ? Non seulement le cochon met son instinct au service de l’homme, mais il pousse le désintéressement jusqu’à lui pardonner de le frustrer, de le dépouiller et de le trahir ! Et, malgré sa perpétuelle déception, il recommence. Les gourmets sauront-ils jamais tout ce qu’ils doivent à ce frère inférieur et à ce flair supérieur ? – La France Gastronomique, Curnonsky et Marcel Rouff, 1921. (5)

Quand le Périgord possédait des truffières en plein rendement, une truie pouvait aisément extraire 20 à 25 kilos de truffes dans sa journée. C’est le matin et le soir que le porc chasse le plus volontiers et le plus fructueusement. S’il est jeune et fort, il peut chasser tous les jours ; mais le plus souvent, on le laisse se reposer, soit certains jours, soit vers le milieu de la journée. Dans les courtes et froides journées d’hiver, le porc peut chasser toute la journée ; mais en été, époque où l’on ne récolte d’ailleurs que la truffe blanche, on le laisse se reposer pendant les grosses chaleurs du jour. La pluie et le grand vent nuisent à son odorat, tandis qu’un temps sec et une terre fraîche (sans être mouillée) l’exaltent. La neige n’empêche aucunement le porc de sentir la Truffe.

À terrasson se tenait un très important marché de la truffe du causse, si réputé que lors de sa visite en Dordogne en 1912, le Président de la République Raymond Poincarré exprima le désir d’assister à la recherche de la truffe avec une truie. C’était hélas, l’été. Les responsables locaux ne voulurent pas le décevoir. On se procura une belle truffe de conserve, on l’enterra. La truie, devant les hautes personnalités, n’eut aucune peine à la retrouver. Le “diamant noir” du Périgord était gracieusement orné d’un floquet de ruban tricolore : c’était la “Truffe du Président”. Le Tour du Périgord en 1900 avec le romancier Eugène Le Roy, Jean-Louis Galet. (6)

Le cavage avec un chien

Parce que plus mobile et plus discret, le chien était, jadis, l’animal préféré des voleurs de truffes. Aujourd’hui, si l’on cave avec un chien, c’est également parce que c’est la méthode de cavage la plus pratique, mais certainement pas la plus efficace. Car, contrairement au cochon, le chien n’a pas la moindre attirance naturelle pour la truffe. Mais avec un dressage assez rapide – quelques semaines suffisent généralement – le chien qui aime chercher – et faire plaisir à son maître – peut devenir vraiment très performant.

Le dressage du chien truffier commence dès que le chien est en âge de comprendre, soit vers 5 ou 6 mois. Comme on s’adresse à un animal intelligent et qui, de plus, refuse de manger la truffe, il suffit de se concentrer sur l’acquisition de réflexes conditionnés. Pour ce faire, on associe petit à petit l’odeur de la truffe à son aliment de prédilection qui sera dissimulé, de façon répétée, durant une dizaine de jours. Le chien doit gratter pour le découvrir. Lorsqu’il arrive à associer l’idée de récompense à l’odeur de la truffe, on enterre les truffes seules. Une friandise sera immédiatement accordée pour chaque truffe découverte. Le chien comprend rapidement et définitivement le principe de cet entraînement. Toutefois, il est indispensable de procéder progressivement, avec beaucoup de patience et une grande douceur. Lorsque la période de l’entraînement est passée, une simple récompense ou une friandise suffiront alors à un chien soucieux, avant tout, de faire plaisir à son maître.

Il n’existe pas véritablement de chiens de race truffière. L’intelligence importe plus que la race. Il existe toutefois des souches réputées où les qualités des ascendants se transmettent de génération en génération. Bergers Allemands, Epagneuls Bretons, Teckels, Fox, Caniches, Pointers, Griffons donnent entière satisfaction à ceux qui les utilisent. Bien qu’il n’y ait pas de race spécifique, la recherche à mis au point une race mieux adaptée : le Lagotto-romagnolo.

Quoiqu’il en soit, un bâtard fait souvent l’affaire, contrairement à bon nombre de chiens de chasse qui ont parfois tendance à se laisser facilement distraire par le gibier de passage… En fait, il faut impérativement un chien au nez fin, cela va de soi. Ensuite, il faut que ce chien soit obéissant, mais aussi complice et affectif. Une parfaite osmose entre l’animal et son maître est primordiale. Il est également préférable d’éviter les chiens de chasse : un chien naturellement prédateur aura tendance à se concentrer sur d’éventuelles proies au détriment des truffes.

Le chien truffier ne constitue pas une race spéciale ; on adapte diverses races à cette chasse par une éducation appropriée : ce sont tantôt des barbets, tantôt des épagneuls, tantôt des chiens-loups, des chiens de berger, toutes races intelligentes et susceptibles d’éducation. Ce dressage en vue de la chasse aux truffes comporte des procédés variés : le principal consiste à cacher une truffe dans un sabot ou dans une petite boîte percée de trous, tantôt une truffe toute seule, tantôt la truffe avec un morceau de lard, à enfouir cet appareil dans le sol, à pousser le chien à l’y découvrir en lui donnant pour récompense une friandise ou tout simplement un morceau de pain. D’autres fois on prépare le chien à goûter et rechercher la truffe en lui donnant du pain imprégné d’huile dans laquelle on a fait cuire ce champignon. C’est du reste une industrie que ce dressage de chiens : dans la Haute-Marne, où la recherche de la truffe est moins lucrative qu’en Provence, un chien truffier se vend jusqu’à 100 francs. — La truffe et les truffières artificielles, J.-E. Planchon. (3)

Un chien bien dressé saura détecter les truffes parvenues à maturité. Les plus doués marquent l’emplacement d’un simple coup de patte, tandis que les autres n’hésitent pas à creuser le sol pour déterrer le précieux tubercule. Mais c’est au maître que revient le privilège de l’extraction qui doit être pratiquée avec d’infinies précautions… Signalons toutefois, le fait que le chien repère parfois des truffes qui ne sont pas encore mûres, alors que le cochon et la mouche s’intéressent exclusivement aux truffes matures.

cavage de la truffe avec un chien truffier

Jusqu’à l’organisation des concours de chiens truffiers, qui apparurent dans les années 1969-1970, les trucs et astuces du dressage étaient considérés comme autant de secrets transmis de génération en génération.

L’usage [du chien truffier] remonte assez haut et vient aussi probablement d’Italie. L’Angleterre, où les truffes sont peu communes, l’Allemagne elle-même, la France, ont dû prendre les barboni ou chiens barbets du Milanais ou du Piémont comme modèles de leurs chiens truffiers. On dit pourtant que les premiers chiens de ce genre achetés en Italie en 1724 par le comte Wakkerbart et amenés en Saxe ne le furent qu’après qu’un chien de berger eut découvert spontanément des truffes à Sedlitz, près Dresde. En Pologne, Auguste II avait dès 1720 fait venir d’Italie dix chiens dressés à cette chasse qui coûtèrent 100 thalers chacun. Ce fut aussi un Italien, Bernardo Vanini, qui dans le Brandebourg obtint vers cette même époque le monopole de la recherche des truffes, à la condition d’en fournir annuellement quelques livres pour la cuisine de la cour. Le Wurtemberg eut aussi ses chiens dressés à l’imitation de deux barboni donnés par la cour de Turin au prince héréditaire de ce pays ; bref, ce fut un caprice, une mode dans les grandes et petites cours d’Allemagne que la chasse à la truffe par les truffel-hunde, les canes tuberario-venatici, comme les appelle un de leurs historiens. Ce goût pour le chien se comprend dans les pays où la truffe n’est l’objet que d’une pure distraction et non d’une exploitation lucrative. On peut bien citer, comme exception, les chiens truffiers de la Haute-Marne, dont feu le regretté Antoine Passy a rappelé les services, et qui fouillent non la truffe noire, mais la truffe d’été et la truffe rousse de Bourgogne dans les cépées de coudriers et les bois de pins sylvestres ; mais en général dans les pays de grandes truffières le porc est l’agent par excellence de cette récolte souterraine. D’après Munier, les trusteurs du Poitou et de l’Angoumois n’emploient que des porcs de cinq à six mois, qu’ils renouvellent tous les ans : dans la Provence au contraire, on aime mieux laisser vieillir les sujets, dont l’aptitude s’accroît par l’expérience, et comme la saison des truffes est courte et qu’il faut nourrir l’animal toute l’année, on préfère la truie au porc mâle, parce qu’elle donne comme produit, en outre de son travail, une ou deux portées de nourrissons. — La truffe et les truffières artificielles, J.-E. Planchon. (3)

Dans son livre « Périgord, mon pays », le cinéaste-baroudeur périgourdin Guy Filhoud-Lavergne, décrit la façon dont on procède au cavage à l’aide d’un chien docile et bien dressé :

« L’itinéraire ne varie pas. Le chien précède son maître. Il ne pénètre sur la truffière que par le côté opposé du vent, le nez rasant le sol. Attention, une allure fébrile, un frétillement de la queue annoncent une trouvaille certaine. Le chien décrit une circonférence, réduit le cercle de ses recherches, pointe le nez, renifle et gratte des deux pattes. L’animal bien dressé marque simplement l’emplacement et attend l’intervention du maître. La truffe est extraite prudemment à l’aide d’une pioche, ou alors souvent grâce à une tige de fer. Parfois, la truffe est profonde, sa recherche difficile, une poignée de terre humée nous annonce pourtant que le tubercule est bien là. Sur un appel, le chien vient donner une nouvelle indication. La truffe extraite, le chien est admis à la flairer et reçoit une récompense : bout de fromage ou morceau de viande. Le trufficulteur procède à la toilette sommaire de la truffe, un peu de terre est enlevée, et la truffe prend place dans le panier ou la musette, bien calée afin qu’elle ne « roule » pas, c’est-à-dire qu’elle n’écrase pas son grain. La chasse reprend, ardente, inlassable. »Périgord, mon pays, Guy Filhoud-Lavergne. (6)

«  Cavage cochon » versus «  Cavage chien »

Bien que le cavage avec un cochon soit rarement utilisé aujourd’hui, cette méthode a néanmoins ses fervents défenseurs : le cochon se fatigue bien moins que le chien et il est beaucoup plus résistant. Il peut caver du matin au soir, tous les jours de la semaine. Et il est très concentré sur son travail, alors que le chien se laissera plus facilement distraire par ce qui se passe autour de lui. Question efficacité, le rendement du cochon est de loin supérieur à celui du chien, d’autant plus que son flair ne s’émousse pas, contrairement à celui du chien. Et il n’est pas nécessaire de repasser aussi souvent dans la truffière ; de ce fait, on la piétine moins ce qui a une incidence positive sur la production.

Pourquoi préférer le chien au cochon ?

C’est avant tout pour une question de facilité. Le chien est bien moins encombrant que le cochon, surtout lorsqu’il est vieillissant. Son pied est léger, et il s’adapte à tous les types de terrains, quels que soient le relief et la végétation. De plus, aller caver dans une truffière éloignée de son domicile avec un cochon nécessite un équipement particulier : petite remorque, bétaillère, pickup… Pour parer au fait que le chien se fatigue plus vite que le cochon et que son flair s’émousse au bout de deux à trois heures environ, il suffit de dresser plusieurs chiens, et de les amener à tour de rôle : un le matin, et l’autre l’après-midi par exemple. En effet, il n’est pas facile de caver en même temps avec plusieurs chiens, car ils ont tendance à se gêner mutuellement.

La préférence donnée au porc ou au chien tient du reste à des considérations variées, souvent personnelles, à ceux qui les emploient. Le porc a plus de force dans le groin, il fouit le sol même dur et fait aux trois quarts la tâche de déterreur ; le chien se fatigue plus vite, il s’endolorit les pieds à gratter les terres rocailleuses ou compactes : il laisse parfois beaucoup à faire à son maître. D’ailleurs, pour peu que l’instinct de la chasse s’éveille en lui (on évite à dessein les races de chiens chasseurs), il s’amuse à courir le gibier ; mais il reprend tous ses avantages auprès des rabassiers marrons, véritables braconniers des truffes. Ceux-ci, grands batteurs de bois, vivant de maraude et forcés d’étendre le champ de leurs courses, dressent leurs chiens à marquer seulement de la patte les places où gît la truffe. Ils profitent à la hâte de cet indice, ils fouillent sans discrétion ni mesurent le champ d’autrui et partent avec leur complice de rapine vers de nouveaux gîtes, où l’œil jaloux du propriétaire se trouve par hasard en défaut. Ce rôle de pourvoyeur illicite n’est pourtant pas fatalement dévolu au chien, il sert aussi légalement d’honnêtes truffiers, et tel d’entre ces derniers, comme le brave Jouval du hameau des Barbiers, près de Croagnes, m’a donné le curieux spectacle du travail combiné du porc découvrant la truffe, faisant le gros œuvre des fouilles, et du chien, achevant la besogne en creusant avec les ongles, prenant le tubercule dans la gueule, mais le versant fidèlement dans la main du maître en échange d’un fragment de pain. — La truffe et les truffières artificielles, J.-E. Planchon. (3)


Les différentes techniques de cavage

Pour rechercher les truffes, on fait appel principalement à quatre techniques :

  1. La recherche à la marque : réservée aux initiés… ou aux braconniers.
  2. Le cavage à la mouche : une méthode insolite.
  3. Le cavage à l’aide d’un cochon : c’est la méthode traditionnelle.
  4. Le cavage à l’aide d’un chien : la méthode la plus pratiquée aujourd’hui.

Pour en savoir plus sur le cavage, consultez la page « Le cavage : la récolte des truffes ». Pour en savoir plus sur les deux dernières méthodes de cavage, consultez la page « Le cavage à la marque et à la mouche ».


Notes :

  •  (1) Léon Michel, Le Périgord, Le Pays et les Hommes, Éditions Pierre Fanlac, 1969.
  •  (2) Jean Robière, La Truffe du Périgord, sa culture, Éditions Pierre Fanlac, Périgueux,1974.
  •  (3) J.-E. Planchon, La truffe et les truffières artificielles, Revue des Deux Mondes T. 8, 1875.
  •  (4) Georges Rocal, Croquants du Périgord, Éditions Pierre Fanlac, Périgueux, 1970.
  •  (5) Curnonsky et Marcel Rouff, La France Gastronomique, Guide des merveilles culinaires et des bonnes auberges françaises, , Éditions Rouff, 1921.
  •  (6) Jean-Louis Galet, Le Tour du Périgord en 1900 avec le romancier Eugène Le Roy, Éditions Libro-Liber, Bayonne, 1992.
  •  (7) Guy Filhoud-Lavergne, Périgord, mon pays, Imprimerie Fabrègue, Saint-Yrieix-la-Perche, 1970.

Crédit Photos :

  • Recherche de truffes à Gignac, dans le Lot, à l’aide d’un cochon truffier, by Robert Vayssié, via Wikimedia Commons.
  • Chien truffier, by Michel Royon, via Wikimedia Commons.
  • La récolte des truffes en Périgord. Le cochon truffier, 1905, domaine public, via Wikimedia Commons.

LES TRUFFES DU PÉRIGORD

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