Le millassou du Périgord

Le millassou est un gâteau de maïs largement saupoudré de sucre vanillé, typiquement périgourdin, qui se présente un peu comme le cake anglais, mais avec une pâte un peu plus compacte. Son goût spécial de fleur le place au premier rang des gâteaux de maïs périgourdins.

Le millassou est une bouillie, à base de farine de maïs, à laquelle on ajoute une belle quantité de graisse d’oie fine (aujourd’hui, on utilise plutôt du beurre), un peu de sel et un demi-verre d’eau, qui cuit dans une grande tourtière pendant une petite heure et que l’on sert au dessert, saupoudré de sucre semoule ou de miel bien fluide. C’est donc un mets assez similaire à la polenta, faite à base de semoule de maïs.

Très apprécié des paysans, le millassou est non seulement économique, mais aussi simple et pratique à préparer : frit à la poêle, il peut être servi comme une sorte de galette ou de crêpe épaisse. Plus simplement encore, la bouillie épaisse, cuite dans de l’eau, peut ensuite être étalée, mise à refroidir et coupée en carrés. Il peut indifféremment être mangé salé ou sucré en fonction de ses besoins.

Le millassou : un mets périgourdin mais pas que…

Le millassou est une spécialité culinaire du grand sud-ouest de la France. On la retrouve aussi bien en Périgord qu’en Gascogne, Midi toulousain, Lauragais, Charentes, et même Pyrénées. Suivant les recettes et les terroirs, le nom – ou simplement l’orthographe – varie : les Périgourdins parlent du millassou, tandis que les gascon utilise le terme milhàs, issu du mot milh, qui désigne le millet, l’ingrédient de base utilisée, à l’origine, sous forme de farine séchée que l’on pouvait faire griller. Au XVe siècle, le millet – à l’origine de son nom – fut remplacé par le maïs venu d’Amérique. Au temps de Jacquou le Croquant, Eugène Leroy fait allusion à ce millassou, celui fabriqué non pas avec du millet, mais avec du « blé d’Espagne », expression désignant le maïs. (3)

Frédéric Mistral (1830-1914), écrivain et lexicographe français de langue d’oc, signale les orthographes suivantes : « mihas »,  « milhas » (Gascogne, Languedoc),  « milhard » (Auvergne),  « melhas » ou  « melha » (Vivarais), et le décrit comme une  « bouillie de farine de maïs, mets fort usité chez les paysans de l’Albigeois ».

La recette traditionnelle du millassou du Périgord

Pour 6 personnes, mettez 100g de raisins secs dans un bol, arrosez-les d’un petit verre d’eau de vie. Laissez-les macérer pendant 15 minutes. Pendant ce temps, mélangez dans une terrine 250g de farine de maïs avec 125g de farine de froment. Faîtes tiédir un verre de lait. Ajoutez 50g de beurre pour qu’il fonde dedans. Cassez 3 œufs et séparez les blancs des jaunes. Fouettez les jaunes avec le sucre. Faîtes une fontaine dans le tas de farine, ajoutez le lait tiédi avec le beurre fondu et mélangez le tout. Ajoutez ensuite les jaunes fouettés avec 3 cuillerées à soupe de sucre. Mélangez intimement. Égouttez les raisins secs. Fouettez les blancs en neige. Incorporez ces deux ingrédients à la pâte. Beurrez un moule et versez y la pâte. Faites cuire le millassou pendant 45 minutes environ à four moyen (200°C). À la sortie du four, saupoudrez de sucre vanillé.

Le millassou du Périgord se mange chaud ou tiède… et peut être servi avec une compote de fruits ! On peut l’associer à un vin blanc sec effervescent comme un Crémant de Limoux, une Clairette de Die, un Vouvray et même un Champagne.

La Mazille dans son livre La Bonne Cuisine du Périgord(1) propose une recette de millassou dans laquelle on a ajouté des raisins gonflés à l’eau-de-vie. On peut également mélanger des petits morceaux de pruneaux aux raisins secs.

Le millassou du Périgord, un dessert toujours apprécié

Aujourd’hui, les recettes de millassou préconisent de mélanger autant de farine de froment que de farine de maïs. Mais au XIXe siècle, seule la farine de maïs tamisée était utilisé pour confectionner le millassou. Cette farine a un goût d’amande et un parfum légèrement vanillé. Le millas peut être préparé de façon très élaborée, voire raffinée, en ajoutant des ingrédients comme du lait, des œufs, et des parfums variés (des gousses de vanille, par exemple). Et certains ajoutent même un peu de levures à la pâte pour qu’elle lève davantage.

À propos du milhas, le millassou à la citrouille

Le millassou du Périgord traditionnel dont nous venons de parler ne doit pas être confondu avec le populaire milhas (ou millas), qui est également élaboré avec cette même farine de maïs, mais surtout avec une forte proportion de citrouille. Ce gâteau est une pâtisserie très commune dans le sud du Périgord. Pour souligner cette similitude avec le millassou traditionnel, les périgourdins appellent ce gâteau sucré le « millassou à la citrouille ». On ne mange plus beaucoup de millassou du Périgord traditionnel, contrairement au millassou à la citrouille qui est un dessert aujourd’hui très apprécié….

Ah, si vous possédiez une tourtière et son couvercle ! Comme il serait meilleur votre milla, cuit feu dessus, feu dessous, au coin de la cheminée. Vous verriez comme il se présenterait gonflé, légèrement brûlé. Vous souriez, vous habitez la ville ?… Tout bêtement, cuisez-le à four chaud.

Il ne faut pas confondre le millassou traditionnel avec le populaire millas à la citrouille !

Il ne faut pas confondre le millassou traditionnel avec le populaire millas à la citrouille !

Les recettes de Milla à la citrouille sont nombreuses. Zette Guinaudeau-Franc en propose plusieurs. En voici trois, plus ou moins facile à préparer :

MILLA À LA CITROUILLEINGRÉDIENTS : 850g de citrouille parée, 1 paquet de floraline, 4 œufs, 5 cuillerées de sucre, 1 paquet de sucre vanillé, 75g de beurre ou de margarine ou 3 cuillerées d’huile ou 1 verre de crème de lait.
PRÉPARATION : cuire à l’eau la citrouille coupée en morceaux. Après l’avoir égouttée, l’écraser en purée, la mélanger chaude encore à la floraline, au sucre, au corps gras ; terminer par les œufs battus. Beurrer un moule à tarte. Cuisson four moyen 30 minutes. Saupoudrer de sucre vanillé. Se sert dans le moule ou se démoule froid. — Les secrets des fermes en Périgord noir, Zette Guinaudeau-Franc (2).

MILLA SARLADAIS. « Lou Millassou » de tante Rose — INGRÉDIENTS : une tranche d’environ 500g de citrouille que vous appelez potiron, 6 cuillerées à soupe (200g) de farine de maïs, 5 cuillerée à soupe (150g) de sucre cristallisé, 2 cuillerées à soupe d’huile ou 75g de beurre fondu, 5 œufs, un 1/2 de lait à doser pour que la pâte soit tenue épaisse mais coulante, 1 pincée de sel, 2 cuillerées de rhum ou zeste râpé d’1 citron ou 1 paquet de sucre vanillé, et 1/2 paquet de levures.
PRÉPARATION : cuire le potiron coupé en morceaux à l’eau légèrement salée, le laisser égoutter, le passer finalement. Mélanger cette purée un peu sèche à la farine de maïs, au sucre, au sel, au beurre qui fondra dans la pâte tiède, aux œufs entiers, au lait, au parfum choisi. La pâte doit rester épaisse et coulante. Certaines cuisinières suppriment la levure, séparent les jaunes, les mélangent de la pâte, battent les blancs en neige avant de les incorporer à l’appareil qui gonflera comme un soufflé et peut se manger chaud à la cuillère. Avec les œufs entiers cuire le gâteau à four moyen dans un moule à tarte à bords un peu hauts, largement beurré ou huilé ; il prendra une belle couleur de cuivre rouge. Servir saupoudré de sucre vanillé. — Les secrets des fermes en Périgord noir, Zette Guinaudeau-Franc (2).

MILLA BERGERACOISINGRÉDIENTS : Se fait de la farine de froment. Un 1/2 litre de lait, 200g de sucre, 80g de farine, 2 œufs entiers plus 1 jaune, 1 belle feuille de laurier-cerise.
PRÉPARATION : faire bouillir une minute la feuille de laurier dans le lait, laisser tiédir, la retirer. Dans un saladier, travailler sucre et œufs, ajouter farine, lait tiède. Verser l’appareil dans un moule à tarte. Mettre à four moyen 30 minutes. Vérifier la cuisson, le liquide doit se solidifier, mais rester crémeux sur le dessus, pour être plus ferme au fond du moule. Le laurier-cerise est un arbuste à feuillage persistant formant en vallée de Dordogne des haies denses d’un ver brillant ; sa feuille donne un goût d’amande amère. Ce parfum peut-être remplacé par une cuillerée de rhum ou un zeste de citron, mais c’est dommage. — Les secrets des fermes en Périgord noir, Zette Guinaudeau-Franc (2).

Comme pour le millassou, il est possible d’ajouter quelques ingrédients. Voici ceux que Zette Guinaudeau-Franc propose :

  • LE MILLA AU RIZ — Cuire à l’eau légèrement salée 100g de riz, égoutter les grains ; les mélanger à la pâte du milla, ils lui donneront du corps en la pointillant de blanc.
  • LE MILLA AUX RAISINS SECS — 125g de gros raisins de Smyrne ou de Malaga ou mieux de raisins de Corinthe, plus petits mais sans pépins, rincés, mis à tremper dans un peu de rhum et incorporés au milla avant de l’enfourner. Une surprise qui ne manquera pas d’intérêt.
  • LE MILLA AUX PRUNEAUX D’AGEN — Dénoyauter une dizaine de beaux pruneaux bien charnus, après les avoir fait tremper dans l’eau tiède quelques heures, les partager en quatre avant de les mélanger à la pâte du milla prête à enfourner.

Sources et notes :

  •  (1) Zette Guinaudeau-Franc, Les Secrets des fermes en Périgord Noir, Éditions Berger-Levrault, 1995.
  •  (2) La Mazille, La Bonne Cuisine du Périgord, Éditions Flammarion, Paris, 2013.
  •  (3) Guy Penaud, La cuisine rustique au temps de Jacquou le Croquant, José Corréa, Éditions La Lauze, novembre 2004.

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