Olivier de Laveleye, l’éloge de la beauté, tout naturellement

Olivier de Laveleye, un amoureux de la Dordogne
C’est en 1961, à l’âge de six ans et à l’occasion de vacances en famille, qu’Olivier de Laveleye découvre la Dordogne dont il tombe aussitôt amoureux. Il y revient régulièrement tout au long de sa vie…

Olivier aime venir se ressourcer en Dordogne, loin de sa Belgique natale et d’une activité professionnelle pour le moins insolite et exigeante : technicien des effets spéciaux pour le cinéma.

Avec son premier appareil photo, « un Leica IIIc ayant appartenu à [son] père », Olivier commence à photographier les animaux. « Le reste m’a très vite désintéressé » dit-il. C’est d’ailleurs, comme il l’explique lui-même, sa « passion pour la nature et le besoin de regarder les choses plus longuement » qui l’ont amené à la photographie.

Alors que son métier exige de lui une précision absolue, au fil des années, Olivier de Laveleye développe le même sens aigu du détail dans son approche de la photographie. Étant amené à réfléchir constamment pour trouver des solutions aux problèmes complexes que pose le cinéma à effets spéciaux, son regard se porte sur une foule de petites choses auxquelles peu feraient attention.

C’est ainsi que l’on découvre, en observant son travail infiniment minutieux, que la surface des yeux des libellules n’est pas lisse comme on pourrait le croire au premier abord ; elle est en effet composée de facettes multiples. C’est aussi comme cela que l’on remarque qu’il y a bien plus d’espèces que ce que l’on s’imaginait… et qu’elles sont souvent là, juste sous nos yeux.

Bien qu’il souhaite s’en éloigner, on retrouve un côté « cinématographique » dans ses œuvres. « Dans le cinéma on perd le côté intime de la photographie où l’on est seul avec son sujet ; le cinéma implique très vite une équipe, une lourdeur dont je n’avais absolument pas envie. » Mais, explique-t-il, « quand je faisais des séries de photos, j’avais du mal à choisir et je me disais qu’en les regroupant, j’arriverais à raconter une histoire à la façon des story-boards. C’est ainsi que l’idée du triptyque m’est venue. Il permet au spectateur de tourner autour de l’animal et de le voir dans son contexte, puis en plan serré, et donc de gagner en informations ».

Le processus est bien plus long que ce que l’on pourrait supposer. En effet, certains insectes n’apparaissent qu’à certaines époques de l’année et ne fréquentent qu’un certain type de plantes. Mais Olivier pense avant tout à la lumière… « Ce qui fait que je pars faire des photos est avant tout la lumière, quand elle est belle et douce, parce que je ne travaille qu’en lumière naturelle. Donc, en général, je ne travaille pas à midi quand le soleil est au zénith et que la lumière est trop contrastée. Je préfère un ciel blanc à un ciel bleu, ou alors une lumière soleil levant ou couchant. »

Il arrive cependant que certaines espèces ne sortent que lorsque le soleil est haut dans le ciel, comme le Moro sphynx par exemple. Il arrive aussi qu’Olivier se plante devant une fleur bien précise et attende un insecte spécifique. Et il peut y passer des heures… « de quoi prendre des coups de soleil ou une insolation » explique-t-il. « J’ai aussi réussi à mettre un appareil en panne à cause de la chaleur. »

Au fil des saisons, Olivier planifie ses nouveaux triptyques ; mais il n’est jamais exclu qu’il produise des clichés magiques totalement par hasard. « Il faut avoir une connaissance de ce que l’on risque de rencontrer pour être prêt. Mais il y a aussi les rencontres fortuites, et ça, c’est évidemment ce qu’il y a de meilleur. »

Parfois, une séance n’est pas suffisante pour obtenir la bonne photo. « Comme la lumière n’est pas toujours la même, on n’est pas toujours chanceux. Il faut donc multiplier les séances. »

Son objectif de prédilection est le 100 mm macro avec lequel il travaille presque exclusivement. « À la rigueur avec un doubleur de focale pour les insectes dont on ne peut pas vraiment s’approcher, ce qui est le cas du Moro sphynx ». Et puis il y a aussi cette interdiction du flash qu’il s’est imposé, « non pas par religion mais par paresse, je ne veux pas avoir à gérer et transporter ça en plus ».

Tous les spécimens photographiés sont rigoureusement identifiés à l’aide de manuels scientifiques et leur identité est ensuite vérifiée à l’aide d’internet… les livres n’offrant souvent que des images d’une qualité insuffisante ou même, dans certains cas, des dessins seulement.

Pour ce qui est de la post-production, Olivier utilise Photoshop, mais le moins possible. « Je m’interdis d’utiliser Photoshop comme un moyen de transformation des images ; la seule chose que j’utilise est la possibilité de recadrage, parce qu’il va de soi qu’un insecte en vol est très compliqué à cadrer parfaitement, il ne faut donc pas à tout prix se focaliser sur le cadrage. C’est l’outil que j’utilise le plus » indique-t-il.

« Parfois, je suis également obligé de retravailler la lumière et le contraste parce qu’on est pas forcément au “ diaph’ ” idéal. La photographie macro ne se travaille pas en automatique, rien ne l’interdit, mais les résultats sont souvent décevants. Je travaille tout en manuel, y compris la mise au point. Comme la profondeur de champ est extrêmement réduite, il faut que cela reste un choix du photographe et pas un choix de l’appareil. Dès lors, il arrive que je me trompe, que j’anticipe mal par rapport à la lumière ou qu’un nuage passe, etc, et on n’a pas toujours le temps de rectifier. Donc le fait de pouvoir le faire après avec Photoshop est un gros avantage. C’est à peu près tout ce que je fais. Ça reste quand même de la photo très naturelle ; je n’enlève ni ne crée des images, je me contente de ce qu’il y a sur le cliché. »

Surya Jonckheere


Cet article a été publié dans le numéro 5 du magazine « Secrets de Pays ».

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