Pierre Boitrel, derrière l’objectif, l’émotion, en plus…

Le regard photographique, tel le don pour la peinture, le dessin, la musique ou l’écriture, conserve une part de mystère… « Mystère » seyant bien à Pierre Boitrel, artiste discret, dont les photos traduisent le regard d’une âme humaniste empreinte de sensibilité.
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Portrait de Pierre Boitrel. © Jacques Saraben

Une enfance paisible dans l’intimité du petit village de Lanquais, mêlée à des origines bretonnes, ont probablement contribué à nourrir son goût pour la nature et le monde animal. La photo animalière – un de ses domaines de prédilection – outre des techniques complexes de mise en œuvre, nécessite moult qualités. Il faut en effet beaucoup de patience, recenser les paramètres favorables à la rencontre avec l’animal, emprunter le bon chemin, prendre garde au vent, aux conditions météo, connaître les animaux, leurs comportements, leur habitat. Bref ! Savoir capter, selon Cartier Bresson, « l’instant décisif ». Pierre conjugue ces compétences. Une grande exigence technique alliée à une extrême sensibilité marquent sa signature.

Écologiste, il l’est ! Hors de question d’envisager une prise de vue mettant en difficulté l’animal, ou lui occasionnant du dérangement. Question d’éthique… Respectueux, il l’est, y compris pour les lieux qu’il investit lors de ses sorties.

Les qualificatifs ne manquent point pour définir l’homme : authentique, humble, discret, sensible…

Outre le règne animal, il s’empare de thématiques éclectiques souvent liées à l’humain. Des portraits aux scènes de vie, du noir et blanc à la couleur, il multiplie et conserve précieusement témoignages présents et passés. Un de ses amis dit de lui « qu’il a la précision liée à son métier de dessinateur ». Pierre n’est le photographe de personne. Il savoure le plaisir de l’instant, sait apprivoiser la lumière, transmettre l’émotion, tout en conservant une part de mystère à son travail, ce qui, toujours, signe sa différence.

1. M. Maures (Molières), aux labours. 2. La moisson en Bretagne… © Pierre Boitrel
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Maurice Chassaigne (Lalinde) sur un râteau-andaineur. © Pierre Boitrel
Sa photo ? Son « âme »… à l’image de son regard !

« À mes débuts, j’ai photographié famille et amis ainsi que tout ce qui m’entourait, les paysages, les monuments. Dans les années 80, j’ai décidé de photographier les personnes qui exerçaient les métiers à l’ancienne tels que je les ai connus pendant mon enfance.

Je suis de la génération de ceux qui ont vécu les plus grands changements, dans tous les domaines, qu’ils soient agricoles, artisanaux ou industriels. J’avais envie de garder une petite trace de ce monde simple, rude et riche en savoir-faire.

Alors je suis allé à la rencontre de ces tout derniers paysans qui utilisaient la force animale, mais aussi les tonneliers, vanniers, feuillardiers, forgerons… Je les ai photographiés dans leurs milieux, les champs, les ateliers. La plupart étaient encore en activité. Certains venaient d’arrêter mais ont réouvert leur atelier gardé intact et ont bien voulu reprendre les outils, pour moi. Ces rencontres sont gravées dans ma mémoire. Ces hommes et ces femmes m’ont raconté leurs métiers avec beaucoup de gentillesse, de générosité et une grande fierté.

Aujourd’hui, il me reste le merveilleux souvenir de gens qui travaillaient beaucoup, tout en sachant donner de leur temps. Il me reste également les photos que j’ai réalisées et que j’ai conservées précieusement comme des photos de famille.

Si j’ouvre aujourd’hui mon album, c’est pour partager, bien sûr, mais je ne suis pas sûr que mes photos de personnages traduisent l’émotion que j’ai ressentie au moment de la prise de vue… car au-delà du regard, il y a la relation à l’autre. C’est sans doute le plus difficile à transmettre, l’émotion !

Je suis également passionné par la beauté de la nature. Source d’émerveillement sans limite, je consacre beaucoup de temps à l’observer… et à la photographier. »

Pierre Boitrel


1. Écureuil roux. 2. Troglodyte mignon. 3. Chevreuil mâle (brocard). Cliquez pour agrandir…

Cet article a été publié dans le numéro 8 du magazine « Secrets de Pays ».

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