La pierre sèche, une pratique ancestrale, contemporaine et d’avenir

La maçonnerie en pierres sèches (dite aussi maçonnerie à sec, maçonnerie sèche ou encore plus familièrement la pierre sèche) est une technique de construction consistant à assembler, sans aucun mortier à liant (chaux, ciment, terre…), des moellons, des plaquettes, des blocs, des dalles, bruts ou ébauchés, pour monter un mur, un voûtement, un sol.

Un élément fondamental et incontournable de notre patrimoine et de nos paysages

Les ouvrages en pierres sèches sont conçus pour durer. On les observe dans tous les recoins de notre Périgord où la pierre abonde. Ils sont très présents tout au long de la vallée de la Couze jusqu’à Bouillac, et très nombreux en Périgord noir.

Ces ouvrages manquent généralement d’entretien, peut-être par manque d’artisans bâtisseurs en pierres sèches ? Ces bâtisseurs, bénéficiant désormais de deux diplômes nationaux (ouvrier bâtisseur et compagnon bâtisseur en pierres sèches), s’intéressent à la technique de la pierre sèche dans son ensemble : création et restauration de murs de soutènement, de murs de clôture, de bâti (cabane, guérite, four à pain) et de calade (sols en pierre). Les secteurs concernés sont ceux de l’habitat, de l’agricole, des jardins et du routier.

Quand nous parlons de pierres sèches, nous pensons le plus souvent aux cabanes, symbole et emblème de la pierre sèche. Or, les ouvrages les plus importants sont ceux qui retiennent et surplombent nos routes et chemins. Nous jugeons la pierre sèche fragile et peu fiable… mais nous roulons dessus sans la voir ! Car bâtir en pierres sèches présente plusieurs avantages…

Des avantages techniques

Le mur en pierres sèches est résistant du fait de la souplesse de sa structure. Il encaisse les vibrations (trafic routier, mouvements géologiques, etc), retient la terre et permet aux eaux de pluie de s’écouler en ralentissant leur cheminement. Les sols recouverts en calades de pierres sèches montrent une résistance particulière dans le temps aux phénomènes d’érosions hydrauliques et humains.

Les intérêts agricoles de la pierre sèche sont nombreux : viticulture, trufficulture, plantation de vergers, potagers, châtaigneraies.

En novembre 2017, la publication des règles professionnelles des murs en pierres sèches a consacré le retour du matériau naturel comme « mode constructif d’excellence », selon l’expression de Jean-Claude Morel, ancien chef du laboratoire génie civil et bâtiment à l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE) à Lyon. 

Des avantages écologiques

La pierre sèche répond aux préoccupations de développement durable et à la crise énergétique actuelle. Ces murs, sans liant, consomment peu d’énergie et ont un écobilan favorable. Seule l’énergie du murailler-bâtisseur est sollicitée. Lorsque les pierres sont triées, rebâties et la terre replacée sur la terrasse, il ne reste aucun déchet.

De plus, la structure en pierre sèche avec ses cavités, trous et niches, permet la vie d’une multitude d’animaux et de plantes participant ainsi à la biodiversité.

Un avantage paysager et patrimonial

Il est évident que les constructions en pierre sèche structurent la qualité d’un paysage ou la beauté d’un site. La pratique de la technique de la pierre sèche permet de restaurer tout un patrimoine vernaculaire qui constitue une mémoire locale et une immense richesse culturelle.

Il s’agit également de maintenir un savoir-faire, celui de murailler-bâtisseur en pierres sèches. On aborde ici l’importance du maintien et de la transmission du savoir-faire, un travail à l’échelle de l’homme et un art aujourd’hui reconnu puisqu’il a été inscrit en 2018 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Quant au métier de murailler, il est inscrit sur la Liste des métiers d’art rares du ministère de la Culture depuis 2010.

Une technique moderne

Grâce aux travaux d’expérimentation menés ces dernières années, deux ouvrages de référence ont vu le jour, il s’agit du Guide de bonnes pratiques de construction de murs de soutènement en pierre sèche et Technique de construction des murs en pierre sèche : règles professionnelles. Ces guides, fruit du travail d’artisans, de techniciens et d’ingénieurs, permettent de dimensionner correctement des restaurations, mais surtout des créations d’ouvrages, notamment des murs de soutènement. Car la construction d’éléments architecturaux en pierre sèche n’est pas une pratique passéiste, elle répond aux enjeux du monde moderne.

L’avenir

Tout le monde peut pratiquer la pierre sèche. Il suffit de sortir de chez soi, d’aller au bout du jardin, devant la maison, d’adhérer à une association locale de sauvegarde et d’entretien du patrimoine comme il en fleurit beaucoup en Périgord. Ces associations consacrent une partie de leur activité à la réfection d’ouvrages en pierres sèches. Les nombreux murs de taille modeste, disséminés dans nos villages et campagne, attendent leurs bâtisseurs et bâtisseuses. Bien sûr les grands et imposants ouvrages demandent assurément une technique confirmée mais aussi une endurance fiable, de la ténacité et un goût du travail de la pierre. Ils sont réservés aux professionnels.

Il existe des formations pour tous. L’École professionnelle de la pierre sèche (ABPS) à L’Espinas (commune de Ventalon en Cévennes) propose des formations pratiques à la demande : formations tout public, formations longue durée pour l’obtention des diplômes, formations pour les artisans souhaitant découvrir ou approfondir leurs connaissances techniques en pierre sèche, etc. Il y a déjà eu une formation tout public en Dordogne, à Vitrac… d’autres sont en préparation.

Le seul risque à pratiquer la pierre sèche est d’y prendre goût !

Texte et photos David Fontayne, Délégué territorial de l’ABPS
www.pierreseche.fr – 04 66 32 58 47 


Cet article a été publié dans le numéro 15 du magazine « Secrets de Pays ».

Vous pouvez vous le procurer en consultant la boutique du site…


LES CABANES EN PIERRE SÈCHE DU PÉRIGORD

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