La halle de Beaumont du Périgord

La halle, cet équipement fondateur des bastides, n’avait pas toujours résisté aux intempéries et aux querelles politiques. Souvent siège du pouvoir des consuls, toujours symbole des échanges au cœur de la ville, la halle reconstruite sur son emplacement d’origine redonne à la place centrale de Beaumont du Périgord son sens premier de représentation du marché et du commerce.

Située sur la place centrale Jean Moulin, la toute nouvelle halle est une reconstruction de la halle originale. Elle renforce le caractère médiéval de la bastide dont les qualités architecturales de ses maisons, de ses couverts, et bien sûr de son église fortifiée classée, sont unanimement reconnues.

Léo Testut un témoin précieux

Léo Testut nous apprend que la halle datait de la fondation de la bastide, au treizième siècle (1272). Les dessins extraits de ses ouvrages reconstituent l’état ancien médiéval. On remarque que les piliers étaient en pierre et du reste, Léo Testut affirme les avoir vus avant leur démolition :

La halle de Beaumont devait, comme l’église, remonter à la fondation de la bastide. Je me rappelle l’avoir vue en 1860. Elle était dans un bien triste état : ses piliers, autrefois verticaux, étaient maintenant plus ou moins infléchis ; sa charpente, profondément vermoulue, menaçait de s’abattre. Sur sa toiture, les tuiles étaient nombreuses, qui se trouvaient déplacées ou plus ou moins brisées. L’édifice, vieux de six cents ans, tombait en ruine. Il ne pouvait rester plus longtemps en cet état : il fallait ou le réparer ou le démolir.

En 1856, une alerte à la démolition eut lieu. M. de Constantin, le maire, avait proposé de la démolir et d’en vendre les matériaux, alléguant un embellissement de la place, mais le conseil municipal rejeta la proposition.

En date du 21 août 1864, M. Félix Foussal, nouveau maire, indique dans le registre des délibérations du conseil municipal de Beaumont : « …vu le mauvais état de la halle, il est urgent de la faire démolir ou de voter des fonds pour son rétablissement. Après une longue discussion, le conseil reconnaissait l’état de vétusté de la halle… Par ces motifs, le conseil est d’avis de la démolition de la halle… » Ce qui fut fait dans l’année, et il faudra attendre 159 ans pour que la bastide de Beaumont retrouve sa halle !

Elle abritait initialement les mesures à grains, comme à Monpazier, mais ce n’est que plus tard, à une date qui nous est inconnue, qu’on les avait transférées au fond d’une ruelle pour devenir la place des mesures. Au XVIIe siècle, la place des mesures existait déjà. On y a reconstruit le bâtiment abritant ces mesures en s’inspirant du dessin ancien qui reconstitue ce qu’avait vu dans son enfance Léo Testut.

Gravures de la Halle de Beaumont-du-Périgord

La nouvelle cloche de 1705

Avant le début des travaux, la DRAC a imposé des sondages archéologiques à l’emplacement exact de la halle médiévale. Le 16 novembre 2011, au cours des fouilles, il a été découvert à plus d’un mètre cinquante de profondeur les restes d’un ancien moule à cloche. Cette découverte n’a pas étonné l’archéologue de la DRAC qui a déclaré qu’il était assez courant de trouver ce type d’indice sous les halles médiévales.

Ce moule a peut-être servi à la confection de la cloche désignée ci-dessous, bénie le 10 septembre 1705 par le curé de Beaumont en présence du parrain, Jean de Martin, juge et maire de Beaumont : « Le dixième jour du mois de septembre mil sept cent cinq, la petite cloche de la présente Église a été bénite par moy, prêtre et curé de la présente paroisse, par commission de Monseigneur L’illustrissime et Révérendissime Paul de Chaulny, Evêque et Seigneur de Sarlat, à l’honneur de St-Front. Le parrain a été Monseigneur Maître Jean de Martin, Juge et Maire de la présente ville et la marraine demoiselle Helaine Tinet, veuve de feu M. Jean Vivier, docteur en médecine ».

La place de Beaumont-du-Périgord et sa halle actuelle

Les marchés autour de la halle

La nouvelle halle rejoue aujourd’hui pleinement son rôle. Les marchés des mardi et samedi y ont cours depuis la fondation de la bastide et la promulgation des Coutumes et Libertés de Beaumont par Édouard Ier roi d’Angleterre et duc d’Aquitaine, le 15 novembre 1286. On peut lire à l’article 31 de la Charte : « Mercatum dicte bastide debet in die martis fieri », « le marché dans la dite bastide de Beaumont aura lieu le jour du mardi ».

Fouilles archéologiques à la Halle de Beaumont-du-PérigordEn 1453, après la victoire de Castillon et le retour à la France de l’Aquitaine, les habitants de Beaumont sollicitèrent le roi Charles VII afin de conserver ces privilèges, ce qui leur fut accordé.

En 1461, Louis XI, qui venait d’accéder au trône, octroya une nouvelle charte inspirée des chartes précédentes. C’est ainsi que depuis sept siècles les marchés et foires ont lieu tous les mardis dans la bastide.

Outre les marchés hebdomadaires, tous les lundis de la période estivale, une foule immense de touristes et de résidents se presse aux « Marchés gourmands ». Une activité nouvelle et conviviale où l’on déguste les produits du terroir tout en appréciant la richesse du patrimoine beaumontois.

Bernard Beslin
© Photo Rémy Cassemiche

Le travail de conception s’est appuyé sur une étude de l’Agence Technique Départementale de le Dordogne (ATD24) étayée par les écrits de Léo Testut, célèbre professeur d’anatomie de la faculté de médecine qui a publié des traités d’anatomie et de nombreux ouvrages sur l’histoire locale de cette bastide. La halle actuelle est proche de celle évoquée par Léo Testut, dans ses dimensions et son implantation. Son concepteur, l’architecte Hélène Lefrancq, a proposé comme référence constructive la halle de Monpazier. Le projet accepté par l’ensemble des élus fut mené à bien jusqu’à l’inauguration, le vendredi 3 juillet 2015.


Bibliographie :

  • Léo Testut, La Bastide de Beaumont en Périgord (1272-1789).
  • Étude historique et archéologique, FERET et fils Bordeaux, 1920.
  • Le livre blanc des bastides, Centre d’Étude des Bastides, 2007.
  • Archives Départementales de la Dordogne

Cet article a été publié dans le numéro 8 du magazine « Secrets de Pays ».

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